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Les îles continentales et les variations du niveau marin
 
La dernière glaciation quaternaire, connue sous le nom scientifique de Würm, a débuté il y a 110 000 ans et s’est terminée vers 12 000 ans. Pendant cette période, une grande partie de l’Europe du Nord était recouverte de glaces comme le Groenland actuel (40). A son maximum, le niveau marin était à 120 m au dessous du niveau actuel en raison du stockage d’énormes quantités de glaces sur les continents; la Manche (41) n’existait pas et les îles britanniques étaient reliées au continent (42, 43, 44, 45), Tout comme SAINT PIERRE et MIQUELON (46) et Terre-Neuve au Québec, géologiquement similaire. Au cours des derniers 12 000 ans, la fusion de ces glaces a provoqué la remontée progressive du niveau marin, qui se poursuit activement de nos jours ; ainsi, Jersey s’est isolée du Cotentin vers 4 000ans av. J.-C seulement (45). Ce phénomène a modifié la géographie des plateaux continentaux, créant une multitude d’îles, granitiques comme dans le golfe du Morbihan (47) ou bien calcaires au large de la Provence 4 ou dans la baie d’Along (48) au Vietnam. Une exception intéressante est à noter : en mer Baltique, la disparition de la calotte glaciaire scandinave a provoqué un soulèvement de la croûte continentale ainsi allégée. Par exemple, les îles Åland (49) situées à l’entrée du  golfe de Botnie remontent de 5 mm par an malgré l’augmentation du niveau marin, et leur surface est passée de 1 000 à 1 500 km2 au cours du dernier millénaire. (À suivre)
 

René Maury,
Professeur émérite à l’Université de Bretagne Occidentale,
Laboratoire Domaines océaniques
 
Sylvain Blais,
Maître de Conférences à l’Université de Rennes I,
Géosciences Rennes,
Membre de la Société philatélique de Rennes
 
Jacques Bouffette
Professeur agrégé à l’Université de
Rennes I
Géosciences Rennes
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Les îles et îlots lacustres sont également fréquents, comme WIZARD Island dans le CRATER LAKE (28) en Oregon. Dans l’île de Luzon aux Philippines, le lac volcanique TAAL (29) contient une île dont le cratère envahi par l’eau possède un rocher central ! Une île peut être rattachée au continent à marée basse comme le Mont Saint Michel (30) mais perd son statut si elle y est rattachée en permanence par une structure naturelle comme une flèche sableuse: elle devient alors une presqu’île. En appliquant ces critères, on décompte actuellement environ 180 000 îles et îlots sur notre planète. Les principales nations insulaires sont l’Indonésie (18)  (17500 îles  et  îlots  dont 6 000 habités), les Philippines (7 100 dont 4 000 habités), le Japon (3 300) et en Europe la Grèce (31) (1 400 dont seulement 227 habités, plus environ 4 600 rochers). En excluant les rochers et bancs sableux même si certains de ces derniers sont habitables (tels les motus des atolls du Pacifique (32),
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ce qui en réduit beaucoup le nombre. La nature de l’eau (marine, fluviale ou lacustre) entourant l’île est indifférente, de même que l’existence de ponts (21) ou de chaussées comme le GOIS de Noirmoutier (22) la réunissant au continent ou à une autre île. Ainsi, l’île de la Cité (23) en est bien une tout comme la Ville Close de Concarneau (24), et les îlots sont nombreux dans les fleuves tels que le Rhin (25), la Seine (26) et la Loire (27).
Combien d’îles?
 
Le nom d’île (Isle en ancien français, Isla en espagnol) vient du latin insula, mais la racine grecque NESOS se retrouve dans le nom de la plus grande nation insulaire du monde, l’Indonésie (18), et dans ceux de nombreux domaines océaniques riches en îles (Polynésie, Micronésie, Mélanésie). Il désigne toute terre émergée en permanence et entourée d’eau, de taille inférieure à celle d’un continent. L’Australie (7 686 000 km2) (19) est généralement regardée comme le plus petit des continents, plus rarement comme la plus grande des îles; elle est suivie, par ordre de taille décroissante, par les îles du Groenland (2 130 000 km2), de Nouvelle-Guinée (800 000 km2), de Bornéo (725 000 km2) et de
Madagascar (578 000 km2). A l’autre bout du spectre se trouvent les îlots qui malgré leur petite taille permettent en théorie l’installation et la survie humaines, bien que beaucoup soient inhabités. Ce n’est pas le cas des rochers et des bancs sableux qui ne sont en général pas comptabilisés parmi les îles (mais peuvent cependant servir de support à un phare) (20),
 
qui sont au nombre d’une trentaine à BORA-BORA (33), il existe 654 îles françaises, dont 286 proches des côtes de la Manche et de l’Atlantique, 115 en Méditerranée, 37 aux Antilles, 129 dans le Pacifique et 87 dans l’océan Indien. On distingue deux grandes catégories d’îles: les îles continentales et les îles océaniques. Les premières sont composées des mêmes roches que les continents; en grande majorité, elles sont proches des côtes de ces derniers (34) et leur nature insulaire est due à la remontée du niveau marin lors des derniers millénaires. Les îles océaniques sont généralement éloignées des continents et d’origine volcanique comme Saint Paul (35) dans le sud de l’océan Indien, même si les laves qui les composent ont parfois été ultérieurement ennoyées sous des formations calcaires, comme par exemple aux Bermudes (36). Les îles micro continentales sont intermédiaires entre ces deux types.
En effet, elles sont formées de roches de type continental mais ont été isolées du continent dont elles proviennent par une ouverture océanique. En plein Pacifique, la Nouvelle-Calédonie et la Nouvelle Zélande (37) sont ainsi des fragments continentaux séparés il y a environ 90 millions d’années du «super continent» du Gondwana. D’autres parties du Gondwana, Madagascar (38), les Seychelles (39) et l’Inde, ont été isolées de l’Afrique puis ont migré vers le nord tout en se séparant l’une de l’autre.
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Du fait de sa taille réduite, l’île est souvent relativement peu peuplée et les communications avec le continent ou les îles voisines peuvent être difficiles ou épisodiques. Il se développe alors un ensemble original d’us et coutumes, qui vont d’un simple particularisme insulaire à la genèse d’une culture spécifique, comme aux Marquises (12). La perte des liens avec la société-mère conduit à une évolution en milieu totalement fermé, générateur de cultures atypiques comme celle de l’île de Pâques (13). Au contraire, le maintien et le développement des communications maritimes peut faire de l’île un grand foyer de civilisation, comme la CRETE et CHYPRE (14) dans l’Antiquité grecque.
A l’instar des groupes humains, les animaux et les végétaux insulaires développent des particularités qui conduisent à l’apparition de sous-espèces ou espèces spécifiques d’une île ou d’un groupe d’îles ; elles sont qualifiées d’endémiques. Leur mise en évidence par DARWIN aux GALAPAGOS pendant le voyage du BEAGLE (15) a joué un rôle important dans l’élaboration de la théorie de l’évolution. Qu’il s’agisse du Tiare APETAHI (16) endémique de RAIATEA dans l’archipel de la Société ou bien des tortues géantes des GALAPAGOS (17), ces espèces sont fragiles et risquent de disparaître si elles ne sont pas efficacement protégées. Elles sont en effet souvent menacées par des espèces introduites volontairement ou non par l’homme, comme les rats ou l’arbuste MICONIA en Polynésie.
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Qui n’a rêvé d’une île ? L’île (isola en italien) est là où l’on s’isole volontairement pour finir ses jours loin des grandes villes comme PAUL GAUGUIN (1) et JACQUES BREL (2) à HIVA  OA aux Marquises, ou pour écrire dans sa tour d’ivoire comme VICTOR HUGO à GUERNESEY  (3). On peut aussi être incarcéré dans une île-prison comme le CHATEAU D’IF (4) ou bien ROBBEN ISLAND près du CAP (5), lieu de détention de NELSON MANDELA ; ou encore  relégué dans une île comme  NAPOLEON à SAINTE-HELENE  (6). Les  îles sont célèbres dans la littérature depuis l’Antiquité : ULYSSE (7) voyage d’île en île dans  l’Odyssée, et l’Atlantide mythique de  PLATON (8) est souvent identifiée à  SANTORIN (9) qui fut partiellement  détruite par l’éruption minoenne  vers 1600 av. J.C. Dans la littérature moderne, on y trouve des  trésors cachés ; on y débarque  souvent suite à un naufrage, maritime comme Robinson CRUSOE ou aérien comme les héros de l’île mystérieuse de JULES VERNE (10). Que faire alors? Survivre tout d’abord dans une île déserte, telle qu’étaient La Réunion (11)ou SAINTE-HELENE avant l’arrivée des premiers explorateurs européens; et, en attendant l’arrivée d’un navire, pourquoi ne pas y recréer une microsociété technologique du XIXe siècle avec caverne naturelle confortablement aménagée (10), vue sur mer imprenable et ligne télégraphique ?.
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Les îles 1
 
Les îles, symboles d’isolement, havres de paix ou lieu de relégation, sites touristiques ou foyers de civilisation, excitent l’imagination et ont donné matière à une riche littérature. Au nombre d’environ 180 000, elles appartiennent à deux grands types. Les îles continentales ont été séparées des continents dont elles sont proches par la remontée du niveau des mers, depuis la fin de la dernière glaciation il y a 12 000 ans. Les îles océaniques sont pour la plupart d’origine volcanique, bien que parfois recouvertes ultérieurement par des calcaires coralliens.
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"SYLVAIN BLAIS : Du continent à l' île"